Les Gallos-Romains de l'Ain

(Izernore, Coligny, Briord)

Exploré pour vous par Cécile, le 20 octobre 2023 - temps de lecture : 5 mn

Temps de visite : retenez toute la journée pour faire le circuit, ou fractionnez en plusieurs fois. Entrée payante aux musées d'Izernore et Briord. Le reste est en accès libre et gratuit. Attention : horaires restreintes d'ouvertures des 2 musées et du hall d'exposition de la mairie de Coligny.

Niveau de difficulté : facile pour les 3 sites antiques... moyen (randonnée) pour les suggestions de visites des sites médiévaux de Saint-Germain et du Mont-Châtel.

Faire quoi ? 

Embarquez pour une grande escapade au nord de Lyon, pour une boucle dans le département de l’Ain. Au cœur de ce territoire de montagnes et d’étangs, reliant les corridors économiques des vallées de l’Ain et du Rhône, suivez les traces qu’ont laissées les sociétés antiques d’il y a 2 000 ans, dans les pas des Gallo-Romains. 

Contrairement à d’autres départements, il ne reste rien dans le paysage actuel du passage des Romains, pas de ville encore existante, pas de port, pas de route… c’est assez rare pour être remarqué à l’échelle de la France. Pourtant, le territoire était bien peuplé et développé. 

Les vestiges que nous vous présentons sont la partie émergée de l’iceberg : ils semblent modestes et discrets, mais sont les témoignages visibles d’une présence bien ancrée sur tout le territoire et encore enfouie dans le sol, dont il reste tout à découvrir ! 

En rouge, les sites antiques : Izernore, Coligny et Briord ; en bleu les sites médiévaux : Saint-Germain, Trévoux - © Google Maps

Voir quoi

1. Isarnodurum, la ville disparue (Izernore)

A Izernore, les vestiges du grand temple sont tout ce qu’il reste de la présence d’une agglomération prospère, Isarnodurum, qui s’étendait dans la plaine de l’Oignin. Il reste de l’édifice 3 énormes piliers, dressés sur une base massive, initialement haute de 2,80 m, ainsi que les soubassements de la cella, la salle centrale. Ces éléments permettent de restituer, dans l’état du IIe siècle, un bâtiment de 17,5 m de long sur 15 m de large et une douzaine de mètres de haut.

Les vestiges du temple d'Izernore : deux des piliers conservés et la base de l'escalier monumental- © Mfrays / CC BY-SA
 Une évocation du temple d'Izernore, par Hubert de Saint-Didier (dessin) et Brunet (gravure),  en 1837  - © H. Brunet / Public domain

C’était un temple de plan classique, probablement celui d’un sanctuaire périurbain, associé à des thermes, reconnus à une trentaine de mètres du temple, à la fin du XIXe siècle. Si ces vestiges sont les seuls en élévation rappelant le passé antique de la commune, le mystère de la disparition de cette ville vous sera expliqué au musée archéologique d’Izernore.

 Evocation d'une villa des alentours d'Izernore - © musée archéologique d'Izernore

2. Coligny, le calendrier gaulois

Le calendrier de Coligny (Ain, France) est une découverte fortuite signalée par son découvreur, en 1987. C’est une table de bronze, éclatée en 149 fragments, qui était accompagné d’une magnifique statue de bronze d’1,70 m représentant un dieu

  La table de bronze (fragmentée et incompète) du calendrier de Coligny - © Lugdunum2 / Public domain
 La grande statue, au musée Lugdunum (Lyon Fourvière) - ©Romainbehar / CC0
Détail de la statue du dieu de Coligny - © Eunostos / CC BY-SA

C'est un calendrier luni-solaire en langue gauloise utilisant l’alphabet latin, daté du IIe s. ap. J.-C. Une fois remonté, il se présente sous la forme d’une plaque rectangulaire d'1,48 m x 90 cm, divisée en 16 colonnes et 4 lignes. On y lit sans difficulté, tant la qualité de la gravure est bonne, des listes de chiffres et de noms. Il s’agit du découpage sur 5 ans des 12 mois de l’année, de 29 ou 30 jours, avec 2 mois intercalaires. Tous sont nommés : les mois d’hiver s’appellent par exemple Dumannios, Riuros et Anagantios

 Relevé publié par Seymour de Ricci en 1926 - © Seymour de Ricci / Public domain
Détail du calendrier - © Gozitano / CC BY-SA

Chaque jour est indiqué par un numéro, en face duquel se trouve un petit trou dans lequel une cheville pouvait être insérée, de manière à repérer le jour courant. L’année commençait au mois de Samonios, qui correspond à peu près à notre Novembre.

Ce spectaculaire calendrier devait provenir d’un sanctuaire proche, et servir à marquer les dates des rites religieux. Il a aussi un jumeau, hélas non conservé : au début du XIXe s., plusieurs autres fragments d’une plaque de bronze portant des inscriptions similaires à celle de Coligny ont été sorti du lac d’Antre et du ruisseau d’Héria, juste à côté du grand sanctuaire gallo-romain de Villards d’Héria (Jura), à une soixantaine de kilomètres. 

Une simple mise en valeur dans le hall de la mairie, cela peut paraître bien modeste compte tenu de la valeur scientifique extraordinaire de ce calendrier, mais l’exposition est concise et bien faite, et vaut vraiment le détour, ne serait-ce que pour les reproductions présentées du calendrier et de la statue du dieu de Coligny. Les originaux sont au musée Lugdunum, à Lyon (Fourvière)

L'un des panneau explicatif à la mairie de Coligny - © Espirat / CC BY-SA

3. Briord, de l'aqueduc à la nécropole

A Briord, enfin, commencez par l’exploration de l’aqueduc souterrain de la Briarette, long de 197 m. Ce tunnel a été creusé pour capter l’eau de la Brivaz et l’amener de l’autre côté de la colline de la Briarette, probablement vers une grande villa, ou peut-être une petite agglomération. 

  L'entrée de l'aqueduc souterrain de la Briarette, visitable. N'oubliez pas votre lampe torche ! - © Chabe01 / CC BY-SA

Il débouche dans tous les cas à proximité de l’autre site archéologique de la commune, la nécropole antique et mérovingienne des Plantées.

  Nécropole des Plantées, soubassements de l'église paléochrétienne - © Chabe01 / CC BY-SA

L’histoire de la nécropole est racontée au musée archéologique de Briord, qui présente l’évolution des pratiques funéraires observées sur le site, au cours de l’époque romaine (inhumation et incinération) puis au début du Moyen Âge, avec l’avènement du christianisme. La vie quotidienne et les coutumes funéraires sont abordées à travers le mobilier accompagnant les défunts dans les tombes, qui, lui aussi, change avec les époques. 

Musée archéologique de Briord, salle Armand Rigoulot  - © Le Progrès

La nécropole romaine, qui n’a pas été fouillée en totalité, se trouvait à la périphérie d’une petite agglomération antique, située sous le village actuel, récemment redécouverte à l'occasion d'une fouille préventive. La nécropole était encore bien présente dans le paysage lorsqu’une église paléochrétienne fut construite dessus, au Ve siècle. 

Ce joli petit musée, tenu par les bénévoles de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Briord, accueille aussi une très belle collection de mobilier lithique issu de différents sites préhistoriques de la région.

Pourquoi y aller ? 

Pour apprécier le département sous 3 facettes différentes, dans 3 paysages très contrastés : la plaine de l’Oignin à Izernore, encadrée les boucles de la belle vallée de l’Ain, les contreforts du Jura à côté de Coligny et la grande vallée du Rhône à Briord.

En outre, les vestiges du passé de ce riche territoire ne se limitent pas à l’époque romaine : puisque vous êtes dans le coin, complétez votre tour du département en passant par le château de Trévoux, très bien conservé, et les ruines romantiques du château de Saint-Germain, à Ambérieu-en-Bugey. En été, visitez également, sur la commune de Val-Revermont (pas loin au sud de Coligny) les vestiges en cours de fouille du castrum mérovingien de Mont-Châtel. L’occasion aussi d’une très belle promenade dans la forêt.

Le château de Trévoux
 Vestiges du château de Saint-Germain, Ambérieu-en-Bugey. - © PPR38 / CC BY-SA