Tales from the Crypt
Les plus belles cryptes de la Chrétienté !
Raconté pour vous par Cécile, le 15 mai 2022 - temps de lecture : 3 mn
Quand ? Moyen Âge
Où ? Espagne, Italie, France
Nous n’allons pas vous proposer une séance d’archéologie horrifique, notre article n’a à voir avec la célèbre série de comics books d’horreur que le nom !
Nous vous entraînons en revanche bien dans les mystérieux et sombres sous-sols des églises de toute la Chrétienté, à la découverte de leurs plus belles cryptes.
Déjà, un petit rappel : la crypte est la partie en sous-sol d’une église, conçue comme une chapelle abritant des reliques sacrées, parmi lesquelles souvent la dépouille (ou un morceau de la dépouille, même si ce n’est que le petit doigt) d’un martyr sanctifié, auquel l’édifice de culte est consacré. Les cryptes sont généralement installées sous les chœurs, mais de nombreuses variantes existent. Par extension, les cryptes sont aussi devenues, parfois, le lieu d’inhumation privilégiés de quelques seigneurs ou de communautés religieuses. On parle alors de cryptes funéraires.
1. La crypte des Capucins, Rome
On attaque fort, avec la très spectaculaire crypte des Capucins, à Rome, sous l’église Notre-Dame de la Conception. Dans cette crypte funéraire du XVIIe s., environ 4 000 moines capucins d’un monastère voisin ont été inhumés. Et comme ça fait autant de monde que dans un gros village, il a fallu rationaliser l’espace ! Comme à la chapelle des Ossements d’Evora (Portugal), les squelettes ont été démembrés et réorganisés pour former d’étonnants murs d’ossements.
Tout cela pourrait être juste insolite sans les momies de moines qui vous saluent de la tête le long des murs, et rendent les choses un poil macabres, d’autant qu’à l’entrée, une inscription vous dit : "Quello che voi siete noi eravamo, quello che noi siamo voi sarete", soit : "ce que vous êtes nous l’étions, ce que nous sommes vous le deviendrez". Bienvenue, quoi !
2. La crypte de San Antolín, sous la cathédrale de Palencia
Contraste saisissant avec les modes de pensée du XVIIe s., voici la très ancienne et très épurée crypte de la cathédrale de Palencia, en Espagne. La crypte conserve en effet tout ce qu’il reste de l’église wisigothique du VIIe s. A cette époque, la pratique religieuse n’avait encore pas grand-chose à voir avec le catholicisme du Moyen Âge roman, mais le principe de la crypte était déjà ancré : en faisant l’objet d’une dévotion particulière et d’un pèlerinage, le tombeau du saint servait de support à la diffusion de la foi.
Originalité du cas de San Antolín : un puits a été creusé l’entrée de la crypte, toujours utilisé pour y tirer l’eau nécessaire aux célébrations religieuses.
3. Tavant, l'énigmatique
Dans la série des cryptes romanes, voici celle de l’église Saint-Nicolas de Tavant (Indre-et-Loire), qui date du XIIe s. Ce n’est pas la plus ancienne, ni le fait qu’elle soit peinte qui la rend si spéciale. C’est d'abord le fait que la crypte est restée murée, depuis une date inconnue jusqu’à la fin du XIXe s., quand son entrée fut redécouverte. C’est à cette occasion que ses extraordinaires plafonds peints ont été remis au jour. Ces fresques, pourtant dans un état de conservation remarquable, n’avaient jamais été retouchées depuis leur création : une vraie plongée 800 ans en arrière !
Mais la notoriété de ces les ensembles de peintures vient surtout du mystère qui entoure les sujets figurés : les décors représentent en effet des scènes encore incomprises de nos jours, sans rapport identifié avec des épisodes bibliques traditionnels. D’autres, davantage compréhensibles, sont composés dans un style tout à fait inhabituel. Une vraie histoire à la Da Vinci Code ! L’art roman conserve encore bien des secrets.
4. Les anges musiciens de Bayeux
La cathédrale Notre-Dame de Bayeux est l’un des fleurons de l’architecture normande, construite vers 1050-1060, du vivant du duc Guillaume le Conquérant, pour son demi-frère l’évêque Odon. Le joyau de l’édifice est sa crypte, qui abritait une impressionnante collection de reliques aussi hétéroclites que douteuses, parmi lesquelles une fiole contenant du sang du Christ, des portions de la Vraie Croix (un classique), mais aussi des cheveux et du lait (!) de la Vierge conservé dans un boitier d’ivoire. Bref, question authenticité, il faut mieux s’intéresser au décor de la crypte qu’au contenu de ses reliquaires.
Sobre mais très original, ce vaste sous-sol est soutenu par 12 colonnes surmontées de fins chapiteaux sculptés. Les retombées de voûte des colonnes centrales sont ornées de 18 anges jouant de la musique, sur fond ocre, peints au XVe s. Chaque ange joue d’un instrument différent, représenté avec énormément de délicatesse. Les plafonds du centre de la crypte figurent un ciel étoilé. On croirait presque entendre l’orchestre des anges dans la voûte céleste. Une expérience intimiste saisissante !
5. Dans les bras de Notre-Dame, à Gargilesse
Pour certains, c’est la plus belle crypte peinte de France, parce que la sobriété de l’architecture est rehaussée par une profusion de décors peints extrêmement expressifs. Voici l’église Saint-Laurent-et-Notre-Dame de Gargilesse, dans le Berry (Indre).
Les fresques qui recouvrent les chapelles de la crypte se superposent du XIIIe au XVIe s., dans un festival de couleurs chaudes et douces. Même la scène de la Résurrection des morts et du Jugement Dernier semble être un moment de renaissance printanière ! On est bien loin des effrayantes conceptions de la mort et des cryptes macabres de l’époque baroque !
Le petit bonus : Boulogne-sur-Mer
Vous aimez les cryptes et les fresques médiévales ? Retrouvez une autre de ces merveilles, dans un style encore tout à fait différent : la spectaculaire crypte peinte de l’église de Boulogne-sur-Mer. Cliquez sur l’image et c’est parti !
Pour conclure, ne vous étonnez pas de voir beaucoup de cas français dans notre sélection : les cryptes sont en effet une caractéristique des églises romanes et pré-romanes, et cette pratique s’est énormément développée en France.