5 grandes civilisations à découvrir par le cinéma
4. Rapa Nui, mystérieuse Île de Pâques
Raconté pour vous par Cécile, le 10 mars 2021 - temps de lecture : 3 mn
Rapa Nui (2014)
Encore un flop pour ce film sur l’Île de Pâques ! Globalement assez éloigné de la réalité historique de la structuration de la société pascuane ancienne, ce film a au moins le mérite de mettre à l’honneur l’une des plus mystérieuses et captivantes civilisations de Polynésie. Franchement, il n'est pas si mauvais !
Car l’Île de Pâques, située au large du Chili, est la plus lointaine des conquêtes des grands navigateurs polynésiens, mais aussi l’une des dernières populations découvertes par l’homme blanc, au XVIIIe s.
C’était aussi la première fois que, à 50 ans d’intervalle, les explorateurs européens observaient et décrivaient les modifications foudroyantes d’une société … indépendantes de leur intervention.
L’île a été colonisée par des Polynésiens originaires des îles de la Société (Tahiti), vers 1200 ap. J.-C. La langue, les références culturelles et l’organisation sociale des Pascuans sont ainsi restées proches de celles des Polynésiens.
Une particularité les en distingue toutefois : l’érection des grands Moais, ces magnifiques statues sombres aux yeux de corail.
Ces éléments emblématiques de l’île de Pâques, qui représentent les ancêtres héroïsés, ne sont pas restés vénérés durant 500 ans : encore dressés lors du passage du néerlandais Jakob Roggeveen en 1722, qui décrit par ailleurs une île boisée, les Moais avaient été abattus, dans un paysage quasi désertique, lors du voyage de James Cook en 1774, et la religion des insulaires avaient totalement changé.
La question des modes de transport et des techniques de redressement de ces immenses moais, alignés parfois par dizaines, a suscité beaucoup d'interrogations. Le mystère est à présent résolu (ce qui est très bien restitué dans le film).
Comme pour l'élévation des menhirs, des dolmens ou des grands obélisques égyptiens, les blocs étaient déplacés couchés ou relevés, en les faisant glisser sur des rondins de bois. Le maintien latéral des monolithes durant le transport, puis lors de leur installation sur un socle, était assuré par un ingénieux système de cordages, dont la tension était savamment équilibrée de part et d'autre du bloc.
Même si des accidents de parcours arrivaient, le grand nombre de moais encore en élévation montre bien qu'en matière de transport de charges de plusieurs tonnes, la technologie n'avait pas besoin d'être très compliquée : ce qui primait sur l'Île de Pâques comme en Égypte ou dans l'Europe néolithique, c'était l'ingéniosité, l'expérience accumulée... et le grand nombre d'ouvriers !
Les recherches archéologiques les plus récentes, qui incluent des analyses de la flore ancienne, ont confirmé plusieurs modifications majeures dans la structure de la société et l’environnement, la plus importante intervenant entre 1500 et 1600 : durant cette période, l’île a été drastiquement déboisée, ce qui a dû entraîner une pénurie dramatique en bois d’œuvre et combustible et entraîné des dissensions internes.
A défaut d’être un succès commercial, le film a fait couler de l’encre parce que ces réalisateurs ne se sont pas encombrés de principes écologiques : à l’issue du tournage l’ensemble des décors installés en plein air ont été abandonné sur place. Cartons, éléments en résine et structures en métal ont jonché la campagne pendant des mois. Contradiction ultime : le film se voulait une fable sociale et écologique sur la préservation des ressources naturelles, en liant déclin de la société pascuane et défrichements abusifs.
Certains n’ont pas peur des paradoxes …